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ADMINISTRATION / CITOYENS - « BLEU, BLANC, ROUGE ». BRÈVES CONSIDÉRATIONS SUR L'USAGE DE LA LANGUE ANGLAISE

Libres propos de David Lovato, docteur en droit, concernant le rapport de la commission d'étude sur la communication institutionnelle en langue française, 15 févr. 2022 (la Semaine Juridique Administrations et Collectivités territoriales n° 17, 2 Mai 2022, act. 320).

L'usage de la langue anglaise sur les nouveaux titres d'identité suscite les ires de l'Académie française. - Quittant sa réserve, elle menace le Gouvernement d'un recours devant le Conseil d'État et, dans cette attente, publie un rapport « Pour que les institutions françaises parlent français ». - Alors que la langue française présente un cadre juridique séculaire, cette disputatio moins linguistique que juridique invite à cheminer dans les allées des siècles pour se remémorer les lois de la langue, les règles de son usage et le rôle d'une brûlante actualité de sa gardienne.

1. L'année 2022 s'annonce comme un millésime exceptionnel d'étude des attributs républicains : après le drapeau, la langue ! (rapp. P. Noual, « Bleu, blanc, rouge ». Brèves considérations juridiques sur l'utilisation du drapeau français : JCP A 2022, act. 1). Depuis quelques années la République des lettres est parcourue de spasmes : influence culturelle, notamment cinématographique, du monde anglo-saxon (v. part. P. Conesa, Hollywar : Hollywood, arme de propagande massive : Robert Laffont 2018) ; dissémination de l'usage de la langue anglaise dans les établissements d'enseignement supérieur (v. not. A. Viola, Le français doit rester la langue de l'enseignement public : AJDA 2002, p. 1512 ; M. Frangi, État, langue et droit en France : RDP 2003, p. 1607) ; querelles sur l'écriture inclusive (v. H. Pauliat, L'écriture inclusive est à éviter dans les textes officiels : JCP A 2017, act. 572 ; G. Koubi, Les textes publiés au Journal officielle sont sans « écriture inclusive » : JCP A 2019, comm. 2072 ; Circulaire du Premier ministre sur l'emploi de l'écriture dite inclusive dans les actes administratifs : Dr. adm. 2019, alerte 56 ; J.-M. Pontier, Le Conseil d'État et l'écriture inclusive : AJDA 2019, p. 994 ; S. Cacioppo, Le Conseil d'État valide la circulaire relative à la féminisation des noms de fonctions et à l'interdiction de l'écriture inclusive dans les écrits officiels : RJPF 2019, n° 6, p. 9). En cette année d'élections présidentielles, le Secrétaire perpétuel de l'Académie française croise le fer pour défendre la langue française (v. H. Carrère d'Encausse et F. Vitoux, Nouvelle carte d'identité bilingue français-anglais : un symbole très fâcheux : Le Figaro 21 avr. 2021 ; Académie française, Rapport de la commission d'étude sur la communication institutionnelle en langue française, 15 févr. 2022). Loin du quai de Conti, les doubles mentions sur les titres d'identité laissent planer la menace d'un recours devant le Conseil d'État.

2. Si certains auteurs s'interrogent sur les lois de la langue (v. not. P. Noual et D. Lovato, Les Lois de Marcel Proust : RDL 2021, n° 5, p. 53), il est ici question de la loi de la langue. Instituée en 1917, la carte d'identité demeure régie par un décret adopté alors qu'Edgard Faure était, avant de devenir académicien français, président du Conseil (D. n° 55-1397, 22 oct. 1955, instituant la carte nationale d'identité). Ce texte a fait l'objet d'une modification en mars 2021 (D. n° 2021-279, 13 mars 2021, portant diverses dispositions relatives à la carte nationale d'identité et au traitement de données à caractère personnel dénommé « titres électroniques sécurisés » (TES)). Celle-ci introduit les dispositions d'un récent règlement européen (Règl. UE n° 2019/1157 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 relatif au renforcement de la sécurité des cartes d'identité des citoyens de l'Union et des documents de séjour délivrés aux citoyens de l'Union et aux membres de leur famille exerçant leur droit à la libre circulation). L'amélioration de la sécurité des titres d'identité permet de lutter plus efficacement contre la falsification et l'usurpation d'identité, notamment numériques (v. D. Lovato, Le faux numérique : la promesse d'une réalité nouvelle : RRJ 2022, n° 1, à paraître). Arborant un nouveau format, elle est traduite en anglais : les mots « name » ou « given name » se trouvent respectivement à côté de la mention « nom » ou « prénom ». Ce zèle français s'avère supplétif car le règlement européen impose seulement une traduction de la mention « Carte d'identité » en « Identity Card » (Règl. UE n° 2019/1157 : préc., art. 2).

3. La loi de 1994 est-elle violée par cette double mention figurant sur les cartes d'identité électroniques (L. n° 94-665, 4 août 1994, relative à l'emploi de la langue française) ? La double mention enfreindrait la Constitution, l'Ordonnance de Villers-Cotterêts et romprait une tradition juridique de primauté du français initiée dès Charlemagne. Cette discrète traduction remettrait en cause le français en tant que langue de la République. De façon plus substantielle, cette querelle questionne sur les liens entre le droit français et sa propre langue. Elle questionne aussi sur le droit en tant que champ de la connaissance et, en particulier, de la linguistique (v. spéc. G. Cornu, Linguistique juridique : LGDJ, 3e éd., 2005 ; S. Neuville, Philosophie du droit : LGDJ, 2e éd. 2021, n° 458). Enfin, elle pousse à s'interroger sur la place occupée par l'Académie française dans la défense de la langue française.

4. Dans ce chemin tortueux, la langue française se trouve contrainte à une entente cordiale avec l'usage de la langue anglaise. S'en trouve-t-elle affaiblie ? Buffon répond qu'« il s'est trouvé dans tous les temps des hommes qui ont su commander aux autres par la puissance de la parole. Ce n'est néanmoins que dans les siècles éclairés que l'on a bien écrit et bien parlé » (G. L. Leclerc Buffon, Discours sur le Style [1753] : Librairie Jacques Lecoffre, 1872, p. 14). Au nom du bien écrire et du bien parler, il convient de mettre en évidence les lois de la langue française (1), avant de mettre en relief sa pratique (2), pour enfin entrevoir sa garde (3).

1. Les lois de la langue française

5. Le décret n° 2021-279 du 13 mars 2021 renforce la sécurité des cartes d'identité et des documents de séjours délivrés aux citoyens exerçant leur droit à la libre circulation. Désormais, un composant électronique est intégré et il comporte des éléments biométriques, une image numérisée de son titulaire et ses empreintes digitales. L'article 2 dudit décret mentionne que la carte nationale d'identité doit comporter une zone de lecture automatique contenant les informations suivantes : le nom de famille, le(s) prénom(s), la date de naissance, le sexe et la nationalité du titulaire, le type de document, l'État émetteur, le numéro du titre et sa date de fin de validité. S'il n'y a que peu à redire sur ces mentions, leur traduction en langue anglaise corromprait la primauté de la langue française dans le document administratif (v. D. Lovato, La prudence et le droit : L'Harmattan, coll. Le droit aujourd'hui, 2022, n° 56). L'origine de cette supériorité prend racine dans les querelles médiévales entre les Universités savantes de langue latine et les Universités royales de langue française (not. F. Grua et N. Cayrol, Méthode des études de droit : Dalloz, 5e éd., 2020, p. 70 – Rapp. S. Lusignan, La Langue des rois au Moyen Âge : PUF, 2004, p. 255 ; N. Catach, Histoire de l'orthographe française : Honoré Champion, 2001, p. 83 ; S. Lusignan, La résistible ascension du vulgaire : persistance du latin et latinisation du français dans les chancelleries de France et d'Angleterre à la fin du Moyen Âge : Mélanges de l'École française de Rome. Moyen-Âge, 2005, n° 2, p. 506).

Les articles 110 et 111 de l'Ordonnance de Villers-Cotterêts d'août 1539 constituent les plus anciens articles toujours en vigueur en droit positif. Rédigée par Guillaume Poyet, l'Ordonnance du Roy sur le fait de justice imposa le français dans la rédaction des actes officiels afin d'éviter les difficultés de compréhension « des mots latins utilisés dans lesdits arrêts ». Œuvre de clarté et de preuve, l'ordonnance parachève la centralisation de l'État en amoindrissant la division entre langues d'oïl et d'oc au bénéfice du « françois ». À cet égard, il achève le déploiement de la langue française dans les actes entrepris par Charles VIII grâce à l'Ordonnance de Moulins de 1490 qui en avait fait la langue maternelle du royaume. Ces textes sont un « acte de rébellion face au latin dominant » (C. Hagège, Le français, histoire d'un combat : Le Livre de Poche, 1998, p. 17 et s.) et n'ont jamais été remis en cause sauf, peut-être, sous la Révolution. Dans les premiers temps de l'Assemblée nationale, les langues régionales ont failli renaître de leurs cendres avant que la Convention n'éteigne pour longtemps ces velléités vernaculaires par le décret du 2 thermidor an II. Depuis 1794, le français est la seule et unique langue de l'administration. Son article 1er impose qu'« à compter du jour de la publication de la présente loi, nul acte public ne pourra, dans quelque partie que ce soit du territoire de la République, être écrit qu'en langue française ». « Après le mois qui suivra la publication de la présente loi, il ne pourra être enregistré aucun acte, même sous seing privé, s'il n'est écrit en langue française » poursuit son article 2. L'explication du lien intime entre la souveraineté de l'État et sa langue est révélée par la circulaire du 28 prairial an II (16 juin 1794) dans laquelle le Comité de salut public, Robespierre en tête, fait mention que : « Dans une République une et indivisible, la langue doit être une. C'est un fédéralisme que la variété des dialectes : elle fut un des ressorts de la tyrannie ; il faut le briser entièrement : la malveillance s'en servirait avec avantage ». Cet héritage jacobin s'est perpétué jusqu'au second septennat du François Mitterrand, au nom de la souveraineté de la France. L'article 2 alinéa 1er de la Constitution, issu de la réforme constitutionnelle de 1992, proclame que « la langue de la République est le français ». Elle est même celle « de l'enseignement, du travail, des échanges et des services publics » (L. n° 94-665, 4 août 1994, relative à l'emploi de la langue française dite Loi Toubon, art. 1er, al. 2) reprenant ainsi l'esprit de l'article 3 du décret de Joseph Lakanal du 27 brumaire an III (17 novembre 1794) sur les écoles primaires. Cette précaution de 1992 est prise quelques mois avant le référendum sur la ratification du Traité de Maastricht et visait, sans doute, à neutraliser les effets de l'éventuelle ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires du 5 novembre 1992. Signée le 7 mai 1999, elle n'a jamais été ratifiée. La France demeure dans l'ambiguïté puisque le Sénat, en sa grande prudence, a rejeté un projet de loi constitutionnel visant sa ratification le 27 octobre 2015 (JO Sénat, 28 oct. 2015, p. 9949).

6. Menacé à sa base par la renaissance des langues régionales, le français se trouverait aussi en proie à la formidable diffusion de la langue anglaise désormais usitée sur les cartes nationales d'identité. Cet emploi renseigne plus qu'il n'y paraît sur les évolutions de la langue du droit : « Si l'étude du langage du Droit est une autre partie de la linguistique juridique, et de la sémantique une approche parmi d'autres de cette étude, le Vocabulaire juridique apparaît dans la sémantique comme un fruit de cette science appliquée au langage du Droit » (G. Cornu, Préface, in Vocabulaire juridique : PUF, 10e éd., 2013, p. VII).

2. L'usage de la langue française

7. Le président de la République lui-même soulignait : « Ceux qui prétendent que Villers-Cotterêts ne fut pas l'acte de naissance du français comme langue de la France ont sans doute raison historiquement mais ils ont tort sur le plan culturel et politique, car la portée symbolique de cet édit résonne encore jusqu'à nous. [...] L'Académie a été conçue pour protéger la langue des coups de force inévitables de ceux qui veulent la soumettre à leur agenda politique ou dogmatique » (E. Macron, Discours du président de la République à l'occasion de la journée internationale de la francophonie, Académie française, 20 mars 2018 : Dr. adm. 2018, alerte 71). L'usage de la langue française en droit présente une dimension singulière dans la mesure où il renseigne sur son rôle politique (v. spéc. E. Le Magnen, Droit, langue, liberté d'expression : la politique linguistique en question. Étude de jurisprudence comparée en France et aux États-Unis : RIDC 2004, n° 3, p. 701). Cette dimension politique est renforcée par le caractère conjoint du travail de la langue entre deux institutions : le Gouvernement et l'Académie française (Le nouveau dispositif d'enrichissement de la langue française : Notes bleues de Bercy, 1998, n° 148, p. 1). L'Académie française est l'institution officielle qui est chargée depuis 1635 d'établir les normes lexicales et grammaticales de la langue française (v. not. Académie française, Bonheurs et surprises de la langue : Philippe Rey, 2018 ; Académie française, Dire, ne pas dire. L'intégrale : Philippe Rey, 2020). Le Conseil supérieur de la langue française (CSLF) a pour mission de conseiller le gouvernement sur « les questions relatives à l'usage, à l'aménagement, à l'enrichissement, à la promotion et à la diffusion de la langue française en France et hors de France et à la politique à l'égard des langues étrangères ». Cette partition des rôles a été très visible à l'occasion de la réforme de l'orthographe de 1990 (v. spéc. Conseil supérieur de la langue française, Les rectifications de l'orthographe : JO, 6 déc. 1990, p. 3) ou encore dans l'introduction des « clauses Molière » (v. R. Loïc, Molière, les marchés publics et le travailleur détaché : JCP A 2017, 2047 ; R. Loïc, Clause Molière, Acte II : le coup de théâtre du tribunal administratif de Nantes : JCP A 2017, 2218 ; R. Loïc, Clauses Molière, Acte III : les faux-semblants du Conseil d'État : JCP A 2018, 2043 ; J.-F. Baffray, Suspension sur déféré préfectoral de l'exécution d'un marché comportant une clause « Molière » : JCP A 2018, 2132 ; F. Llorens et P. Soler-Couteaux, Molière si tu savais ! : Contrats-Marchés publ. 2018, 1 ; R. Reneau, La « clause d'interprétariat » : du Tartuffe à Scapin : AJDA 2018, p. 162 ; A. Mangiavillano, La clause Molière, une tartufferie ? : D. 2017, p. 968). Greffier de l'usage, l'Académie française établit des préconisations qui sont en général respectées avec scrupule (Académie française, La féminisation des noms de métiers et de fonctions : academie-francaise.fr, 28 févr. 2019, spéc. p. 3-4 et p. 20 – Rapp. P. Mousseron, Mutation des usages en matière de féminisation des noms de métiers et de fonctions : JCP E 2019, chron. 1252). Cette révérence du Gouvernement envers la noble institution du Quai de Conti réside dans son statut officiel de gardienne de la langue.

3. La garde de la langue française

8. Les lettres patentes de 1635 définissent avec clarté le statut de l'Académie : « La principale mission de l'Académie sera de travailler avec tout le soin et toute la diligence possibles à donner des règles certaines à notre langue et à la rendre pure, éloquente et capable de traiter les arts et les sciences » (Lettres patentes pour l'établissement de l'Académie française, signées du roi Louis XIII en janvier 1635, enregistrées au Parlement le 10 juillet 1637, art. XXIV ; rapp. M. Fumarolli, La Coupole, in P. Nora (dir.), Les lieux de mémoire, t. 2 : Gallimard, 1997, p. 1923). Depuis la Restauration, l'Académie est assimilée aux cours supérieures comme instance suprême en matière de langue (Ordonnance du roi concernant la nouvelle organisation de l'Institut, 31 mars 1816). Cette gardienne se trouve parfois vigoureusement contestée sur le terrain de la légitimité car ses positions pourraient passer pour conservatrices (ex. E. Viennot et al., L'Académie contre la langue française. « Le dossier de la féminisation » : éd. IXE, 2016 ; J.-P. Chazal, La nouvelle querelle des dictionnaires : misère linguistique ou misère intellectuelle ? : D. 2016, p. 889). Bien que l'Institut de France emploie des linguistes et des grammairiens, les Quarante ne sont ni grammairiens, ni linguistes, ni philologues, ni même toujours écrivains. Il pourrait leur être reproché leurs déclarations péremptoires, infondées, voire réactionnaires. En outre, l'Académie s'exprime par des actes juridiques ambigus quant à leur nature juridique : des positions (ex. pour la réforme de l'orthographe de 1990 : Académie française, Position de l'Académie française : academie-française.fr, 1990).

Néanmoins, mépriser ces positions revient à ignorer le statut de l'Académie : « l'Institut de France, ainsi que l'Académie française, l'Académie des Inscriptions et belles lettres... sont des personnes morales de droit public à statut particulier... » (L. n° 2006-450, 18 avr. 2006, de programme pour la recherche, art. 35). À ce titre, l'Académie française a la capacité juridique d'ester en justice aux fins de voir retirer la mention anglaise des nouvelles cartes nationales d'identité. En ce sens, l'Académie poursuit sa mission de « veiller sur la langue française et accomplir des actes de mécénat », y compris en agissant au sens processuel du mot (v. L. Aucoc, L'Institut de France et les anciennes Académies : Plon, 1889 ; P. Gaxotte, L'Académie française : Hachette, 1965 ; D. Fernandez et F. Ferranti, Académie française : Philippe Rey, 2013). Puisant sa légitimité par l'onction du droit, l'Académie française est une personne juridique dont l'intervention reflète « les maîtres de l'art, parmi les hommes éminents qui représentent ici la splendeur littéraire de la France, et dont les noms, célébrés aujourd'hui par la voix des nations, retentiront encore avec éclat dans la bouche de nos derniers neveux » (G. L. Leclerc Buffon, Discours sur le Style [1753] : préc., p. 14). En veillant sur le français, l'Académie veille sur l'« immortalité » de la langue car, à travers elle, se perpétue la France (H. Carrère d'Encausse, Des siècles d'immortalité : Fayard, 2011 ; rapp. G. Sapiro, La Responsabilité de l'écrivain : Seuil, 2011). Au moment de rejoindre cette illustre cohorte, le naturaliste Buffon déposait ces mots au pied de la Coupole : la langue de la France dépasse la farandole fantastique de mots, le français est un style, celui capable d'« agir sur l'âme et toucher le cœur » (G. L. Leclerc Buffon, Discours sur le Style [1753] : préc., p. 15).

9. Que retenir de ces brèves considérations sur l'usage de la langue anglaise sur les titres d'identité français ? Les optimistes n'y verront rien à redire. Les pessimistes s'exclameront sans doute : la langue française se meurt ; la langue française est morte ! Faut-il s'en tenir à cette vision manichéenne ? Assurément pas ! Que faut-il lire dans l'appel de l'Académie française ? Conservatisme ? Chauvinisme ? Nationalisme ? Rien de tout ceci. Inaction ? Conservation ? Réaction ? Rien de tout cela non plus. L'illustre compagnie entend que soit respectée « la puissance absolue et perpétuelle » de la France sur sa langue (v. J. Bodin, Les six livres de la République : 1576, Premier Livre VIII). Cette préservation est devenue un enjeu juridique décisif (v. part. CE, 1er avr. 2022, n° 450613, Sté Amaya Service Limited : Lebon T. ; JCP A 2022, act. 279). Si l'Académie était demeurée inerte face à l'expansion tentaculaire de l'anglais, il aurait fallu s'écrier : « What a pity Iago, what a pity ! » (W. Shakespeare, Othello [1604] : Œuvres complètes. Tragédies, t. I : Gallimard, 2002, IV, 1).

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